Estelle Devillers : "Rééditer et contextualiser les textes féminins anciens"
Estelle Devillers a grandi entourée de livres. Après différentes expériences dans l’enseignement et le milieu associatif, elle fonde les Éditions de la Harpie au sein de l'incubateur ALCA, qui rééditent des textes de littérature anciens, permettant de redécouvrir la subtilité du regard féminin à travers les siècles et de trouver sa place au sein de cet héritage.
Pourquoi avoir décidé de créer votre maison d’édition ?
J’ai eu l’opportunité de grandir dans un environnement culturel où les livres ont toujours été très importants pour moi. Je vois aujourd’hui l’intérêt de cette ouverture d’esprit dès mon plus jeune âge, qui a pu orienter plus ou moins la ligne éditoriale de la maison que j’ai créée aujourd’hui.
Après une classe prépa littéraire, un master en recherche littéraire, de l’enseignement en français et une expérience en édition dans une structure associative en plus de l’année spéciale de l’IUT Métiers du livre de Bordeaux-Montaigne, cette dernière m’a beaucoup influencée dans mon rapport à l’édition et c’est là que j’ai ressenti une véritable envie de me lancer dans la création de ma structure.
Quel est votre projet et comment a-t-il été influencé par l’incubateur ?
Les Éditions de la Harpie proposent des textes féminins anciens, recontextualisés mais aussi réinscrits dans leur filiation littéraire et militante. C’est-à-dire que nous nous sommes donné pour but de rééditer les textes anciens et méconnus des grandes figures qui ont participé à la fondation du féminisme actuel en les inscrivant dans leur époque, mais aussi dans le paysage littéraire et militant postérieur.
Le nom de la maison pose la question de l’hybridation, ce va-et-vient entre l’ancien et le moderne que nous travaillons au sein de la maison, mais surtout un clin d’œil féministe à la figure de la Harpie, ce monstre à corps de vautour et à tête de femme dans les mythologies grecque et romaine. Ce qu’on veut dans cette maison, c’est publier ce qu’on veut, des œuvres qui nous tiennent à cœur et qui ont du sens pour nous et notre cible.
L’incubateur d’ALCA a formé une espèce d’intimité avec le groupe et les intervenants, de la proximité entre cette diversité de profils que nous étions tous et toutes, même si j’ai eu du mal à trouver un équilibre entre ma vie de salariée et cet incubateur. En tout cas, je me suis enfin lancée ; si je venais d’une famille d’entrepreneurs, j’aurais peut-être pu créer ma structure plus simplement. Aujourd’hui, nous sommes en cours de finalisation de l’association et sommes sur le point de déposer nos statuts !
Quels sont les futurs projets de La Harpie ?
Dans un futur proche, nous souhaiterions nous consacrer à des projets de traduction, au format semi-poche puisque c’est de la réédition. Il y a des traducteurs et des traductrices dans les membres de l’association donc cela nous facilite le travail. Alors pour commencer, nous voudrions publier des rééditions avec révision de traduction, et nous atteler à des éditions princeps ensuite. Nous n’avons pas de borne chronologique, les textes peuvent s’inscrire dans toutes les époques. Ce sont des thématiques tellement précises, que nous avons besoin de temps pour y réfléchir. Notre volonté se résume en le fait d’avoir des textes hybrides... comme la figure de La Harpie !
Propos recueillis par Flora Ghedjati Reigneau