Lycéens et apprentis au cinéma en Nouvelle-Aquitaine – focus sur les films de l’édition 2021-2022
ALCA propose une liste de films sélectionnés pour l'édition 2021-2022 du dispositif Lycéens et apprentis au cinéma en Nouvelle-Aquitaine (Académie de Bordeaux).
JOSEP (Aurel – Drame – France / Espagne / Belgique – 2019 – 1h14 – Avec les voix de Sergi Lopez, Bruno Solo…)
Février 1939. Submergé par le flot de Républicains fuyant la dictature franquiste, le gouvernement français les parque dans des camps. Deux hommes séparés par les barbelés vont se lier d’amitié. L’un est gendarme, l’autre est dessinateur. De Barcelone à New York, l'histoire vraie de Josep Bartolí, combattant antifranquiste et artiste d'exception.
"Dessinateur de presse, auteur d’une vingtaine d’ouvrages et de nombreux reportages graphiques, Aurel dont le premier court métrage s’appelait Octobre noir, entre dans la cour des grands. Avec Josep, il signe son premier long métrage, un film d’animation dont la puissance d’évocation l’apparente aux conteurs les plus doués. "Montrer le dessin comme un cri", dit-il, et en effet, chacun de ses plans s’ancre dans le cœur de ceux qui regardent.
Le film est splendide, non seulement parce qu’il prend le parti de la complexité jusque dans le trait, à la fois esquissé et ardent, mais aussi car il ressuscite une époque par le truchement d’une rencontre: celle d’un gamin d’aujourd’hui avec son grand-père. Le vieil homme est en train de mourir. Il raconte pour la première fois à son petit-fils ce qu’il en fut de ces camps, lui qui en était l’un des gendarmes. Magnifique éloge de l’art, de l’obstination des individus, de l’héroïsme sans gloriole, celui qui sauve sans attendre d’être récompensé. Le scénario de Jean-Louis Milesi ajoute à un récit où rien n’est binaire, où le temps, soudain, enfle et bouleverse."
Par Sophie Avon – Sud-Ouest
Ressources pour exploiter le film :
- Dossier pédagogique : http://www.languedoc-roussillon-cinema.fr/sites/default/files/documents/dossier_pedagogique_josep_.pdf
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Entretien avec le réalisateur.
PSYCHOSE (Alfred Hitchcock – Thriller / Horreur -Epouvante – USA – 1960 – 1h49 – Avec Anthony PERKINS, Janet LEIGH …)
Dans la ville de Phoenix en Arizona, Marion Crane, employée modèle à la vie ordinaire, est chargée par son patron de déposer à la banque 40 000 dollars, résultat d’une transaction immobilière. Elle s’enfuit en voiture avec cette somme pour rejoindre son amant, avec lequel elle compte profiter de l’argent pour éponger leurs dettes et se marier. Un violent orage éclate alors, forçant Marion à s’arrêter dans un motel isolé..
"La question qui taraude les cinéphiles : ce film mérite-t-il son label de classique ou a-t-il souffert de l’épreuve du temps ? Que l’on se rassure, Psychose tient encore haut la main son rang de référence en la matière. En dépit de l’avalanche, ces deux dernières décennies, de productions bâties sur le même modèle (tueur taré et coup de théâtre final), le film d’Hitchcock surprend toujours par sa modernité, son audace formelle (certains plans incroyables pour 1960), et les pathologies qu’il met en scène. En effet, Hitchcock maîtrise parfaitement son sujet, ainsi que le déroulement du récit ; les temps morts sont rares, le suspense est haletant pour ceux qui ne connaissent pas le dénouement - les effets de montage notamment sur la scène de la douche sont très efficaces. Enfin, il faut souligner la performance hypnotique d’Anthony Perkins, magnifique dans sa dualité psychologique où l’innocence cohabite avec la folie meurtrière la plus sauvage. Sans oublier la troublante Janet Leigh, parfaite en fausse ingénue aux capacités vocales impressionnantes. "
Par Edgar Hourrière – À voir à lire
Ressources pour exploiter le film :
- Dossier pédagogique édité par le CNC : https://www.cnc.fr/cinema/etudes-et-rapports/dossiers-pedagogiques/psychose-de-alfred-hitchcock_849735
- Pour approfondir :
- Émission de France Culture sur l’angoisse dans les films d’Alfred Hitchcock
- Analyse filmique audio des films d’Hitchcock
- Analyse de la scène de la douche
CAROL (Todd Haynes – Drame/Romance – USA – 2016 – 1h58 – Avec Cate BLANCHETT, Rooney MARA…)
Dans le New York des années 1950, Therese (Rooney Mara), jeune employée d’un grand magasin de Manhattan, fait la connaissance d’une cliente distinguée, Carol (Cate Blanchett), femme séduisante, prisonnière d’un mariage peu heureux. À l’étincelle de la première rencontre succède rapidement un sentiment plus profond et les deux femmes se retrouvent bientôt prises au piège entre les conventions et leur attirance mutuelle.
"Tournée en 16mm, ce qui lui donne un grain d’images saisissant, son Carol fait, en effet, sans cesse résonner sa mise en scène, empruntant à l’arsenal stylistique du film noir pour mieux dire l’ambiguïté, l’amertume, la tristesse que révèle aussi ce magnifique combat pour avoir le droit d’être qui l’on est. Jeux de désaxages et de reflets, direction photo ciselée, signée Edward Lachman, faisant du vert et du jaune ses tonalités dominantes, musique d’une grande mélancolie composée par Carter Burwell, compositions de plans d’une finesse remarquable, souplesse des mouvements de caméra… le classicisme un rien vintage de la forme s’allie avec profondeur à la modernité du propos. Bouleversant sur le fond, sublime sur la forme, Carol, comme toujours chez Haynes, brille encore par la performance de ses actrices monstres. Rooney Mara, délicate, fragile, timide fait face à l’impériale Cate Blanchett, tétanisante de talent, grande bourgeoise qui, en un froncement de sourcils, un plissement de son regard de chat, parvient à transmettre une épaisseur, une grandeur, un mystère proprement palpitants. Blanchett, nous le savions déjà, est une reine. Mais lorsqu’elle rencontre, par la grâce d’un film flirtant avec la perfection, un cinéaste qui sait mieux que les autres le voir, notre cœur ne peut plus que se soumettre et se tenir, à jamais, aux côtés de cette femme irrésistiblement debout."
Par Hélène Faradji – Bande à part
Ressources pour exploiter le film :
- Dossier pédagogique édité par le CNC : https://www.cnc.fr/cinema/etudes-et-rapports/dossiers-pedagogiques/carol-de-todd-haynes_849659
- Pour approfondir : présentation par le critique J. Momcilovic
BANDE DE FILLES (Céline Sciamma – Drame – France – 2014 – 1h52 – Avec Karidja Touré, Assa Sylla…)
Marieme, 16 ans, vit en banlieue. Silhouette féline, nattes africaines, œil de biche, elle est d’une beauté ravageuse. En échec à l’école, mère de substitution à la maison, elle s’occupe de ses petites sœurs en essayant d’éviter les coups de son grand frère. Jusqu’au jour où elle rencontre trois filles, bien décidées à ne pas se laisser dicter de loi. Des bagarreuses, des enjôleuses, des drôlesses, qui soignent leur style et balancent leurs répliques avec une rage joyeuse. Pour cette bande de filles à la féminité explosive, pas question d’être des épouses cloîtrées, trimant dur comme leurs mères soumises à la domination masculine…
"Si le portrait de Vic est complexe, si le tableau des mécanismes sociaux qui agissent sur elle est subtil, Céline Sciamma reste néanmoins une cinéaste “ligne claire”, limpide dans son récit et ses options de mise en scène. Comme dans Naissance des pieuvres ou Tomboy, elle montre une véritable aisance pour rendre la complexité parfaitement lisible. Ici, elle est bien aidée par un quatuor de comédiennes effectivement pur diamant : Karidja Touré, Assa Sylla, Lindsay Karamoh et Mariétou Touré sont aussi craquantes, marrantes, poignantes que leurs doubles de fiction. Quand on voit tant de beauté, de talent, de vivacité, d’intelligence et de sensibilité à l’œuvre, on se demande mais comment, comment, comment peut-on être zemmourien ?! Car Bande de filles est aussi politique que Tomboy, non parce qu’il déploie un message programmatique mais parce qu’il se place pile-poil au cœur des prurits qui démangent une partie de la société française. Ce titre, Bande de filles, désigne aussi bien le groupe qu’une insulte réappropriée. Etre traitée de “fille” (ou de “pédé”, de “goudou”, de “youpin”, de “négro”…), c’est toujours un honneur parce que ça vient toujours d’une bande de cons."
Par Serge Kaganski - Les Inrocks
Ressources pour exploiter le film :
- Dossier pédagogique édité par le CNC : https://www.cnc.fr/cinema/etudes-et-rapports/dossiers-pedagogiques/bande-de-filles-de-celine-sciamma_306673
- Fiche interactive à projeter en classe
Pour approfondir :
Entretien avec Céline Sciamma :
Entretien avec les actrices du film :
ATLANTIQUE (Mati Diop – Drame – France / Ségénal / Belgique – 2019 – 1h45 – Avec Mama Sané, Ibrahima Traore…)
Dans une banlieue populaire de Dakar, les ouvriers d’un chantier, sans salaire depuis des mois, décident de quitter le pays par l’océan pour un avenir meilleur. Parmi eux se trouve Souleiman, qui laisse derrière lui celle qu’il aime, Ada, promise à un autre homme. Quelques jours après le départ en mer des garçons, un incendie dévaste la fête de mariage d’Ada et de mystérieuses fièvres s’emparent des filles du quartier.
"La jeune franco-sénégalaise Mati Diop (première femme noire en compétition à Cannes) révèle son immense talent composite à travers cette œuvre à l’étrange beauté. Enracinée dans une réalité géopolitique à Dakar (la jeunesse orientée vers l’exil), la réalisatrice passe par les chemins inattendus du cinéma de genre. Par le fantastique, lorsque les disparus reviennent, envoûtés ; par le film policier, lorsqu’une enquête est lancée ; et même par le cinéma expérimental, avec des images contemplatives purement formelles et détachées du récit. Associée à une voix off, ces scènes ont une dimension poétique enchanteresse. Cette fable sociale et ce film de fantômes opèrent un double mouvement, le premier est un départ, un désir d’ailleurs, le second est un retour. La dureté du réel s’accompagne d’une esthétique soignée, crépusculaire, invitant à la méditation. Ce poème est habité par des spectres, et nous met dans un état de pur envoûtement. On peut penser au Thaïlandais Apichatpong Weerasethakul dans cette manière de convoquer l’indicible. Sombre et hantée, cette histoire est celle d’un amour heurté par le deuil, ce qui achève de nous émouvoir. Cette romance irradiant tout le film donne lieu à de magnifiques scènes où s’expriment les corps. Mati Diop parvient alors à conjuguer le politique avec le sensible, les combats sociaux avec le charnel."
Par Benoît Basirico – Bande à Part
Ressources pour exploiter le film :
- Dossier pédagogique : en cours d’élaboration
- Pour approfondir : Entretien avec Mati Diop
LE TEMPS DES FORETS (François-Xavier Drouet – Documentaire – France – 1h43)
Symbole aux yeux des urbains d'une nature authentique, la forêt française vit une phase d'industrialisation sans précédent. Mécanisation lourde, monocultures, engrais et pesticides, la gestion forestière suit à vitesse accélérée le modèle agricole intensif. Du Limousin aux Landes, du Morvan aux Vosges, Le Temps des forêts propose un voyage au cœur de la sylviculture industrielle et de ses alternatives. Forêt vivante ou désert boisé, les choix d'aujourd'hui dessineront le paysage de demain.
" Qui a voulu que les choses se passent comme ça ? C’est sans doute une question que l’on pourra se poser dans quelques années à propos de l’état de la forêt française, devenue mono-essence dans sa majorité avec, sans doute, quelques îlots de forêt sauvage. Le problème est posé dans les premières minutes du film : en France, pas de déforestation, mais plutôt une « mal-forestation ». Une logique productiviste insensée qui conçoit la forêt comme une exploitation agricole moderne, dans le but unique d’en tirer des profits optimisés, pour quelques-uns. On découvre ainsi une logique du pire, qui pousse des forestiers (pas tous), à abattre les arbres en masse pour rembourser les emprunts liés à l’achat des machines, à détruire les substras, à pratiquer la mono-essence d’arbres sur les parcelles, à utiliser les pesticides et les engrais... C’est donc un documentaire très clair, aux questions discrètes, qui dresse un panorama complet de l’état de la silviculture d’aujourd’hui, sous tous ses aspects, à travers 4 régions forestières françaises, Le Morvan, Les Vosges, les Landes et le Limousin. Les images sont tour à tour, magnifiques, poétiques ou monstrueuses, notamment les machines qui transforment en un clin d’œil un arbre vivant en produit vendable. « Le temps de forêts » est un film utile, bien sûr, sans catastrophisme exagéré, mais aussi un vrai film de cinéma, qui sait laisser leur place aux images, aux personnages et au spectateur, et qui vous fera voir la forêt, sauvage ou industrielle, d’un autre œil quand vous croiserez ses chemins."
Par Jean Le Maître – Mini-Gazette du Jean Eustache
Ressources pour exploiter le film :
- Dossier pédagogique : en cours d’élaboration
- Pour approfondir : https://www.kmbofilms.com/le-temps-des-forets
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(académie de Bordeaux)
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