"Toutes les librairies indépendantes sont aujourd'hui prêtes à accueillir du public"
Cinq jours après l'annonce de la fermeture des librairies imposée dans le cadre de ce deuxième confinement, Cécile Bory explique la frustration des librairies indépendantes néo-aquitaines dont elle préside l'association.
3 questions à...
Cécile Bory, présidente des Librairies indépendantes en Nouvelle-Aquitaine (Lina) et libraire à la Librairie Georges (Talence, 33)
Comment les libraires indépendants réagissent-ils à la fermeture de leur commerce imposée dans le cadre de ce deuxième confinement ?
Bien que nous nous attendions à cette fermeture, nous sommes déçus par cette décision dans la mesure où nous nous étions préparés. Après s'être formées à la gestion des flux et l'application de toutes les précautions sanitaires, toutes les librairies indépendantes sont aujourd'hui prêtes à accueillir du public. Cette fermeture est une frustration, à la fois pour nos libraires qui vont évidemment réaliser moins de chiffe d'affaires dans une période habituellement faste et pour nos clients qui ne pourront pas s'appuyer sur les conseils et le confort de l'accueil physique en magasin. Face à cette fermeture, les librairies ont pour la plupart développé des systèmes de clique et collecte, certaines proposant même des livraisons. Tout le monde y va de sa créativité pour répondre à une appétence très forte pour le livre, une solidarité de la part des lecteurs qui nous réconforte.
Par ailleurs, la décision annoncée hier par le Premier ministre interdisant la vente de livres dans les grandes surfaces nous satisfait parce qu'elle rétablit une équité mais elle n'est pas pour autant la solution car c'est finalement Amazon qui profite de la situation. Face à cette concurrence déloyale, je suis touchée comme mes homologues libraires par la grande prise de conscience qui s'exprime ces derniers jours en notre faveur et invitant à un boycott d'Amazon.
Que représente cette fermeture pour la profession à la veille de Noël et à la suite d'un printemps confiné ?
Les enjeux financiers sont considérables puisque les mois de novembre et de décembre sont pour la plupart des libraires ceux qui concentrent l'essentiel du chiffre d'affaires annuel, le livre étant en France le cadeau numéro 1 à Noël. Il y a eu un engouement incroyable et inespéré à la suite du confinement dans nos commerces, au point que certains ont pu récupérer le chiffre d'affaires perdu au printemps. Mais nous avons néanmoins noté un ralentissement de la demande à la rentrée, surtout pour les librairies ne faisant pas de manuels scolaires, et nous devons garder en mémoire que les librairies restent les commerces disposant du plus faible taux de marge.
Lina accompagne les librairies de son réseau notamment avec des actions de sensibilisation à destination des lecteurs. Quelles autres actions prévoyez-vous de mettre en place ?
Nous avons engagé dès vendredi dernier, au premier jour ce deuxième confinement, des actions de communication invitant les lecteurs à se rendre sur le site de l'association pour réserver les livres auprès de leur libraire indépendant. Cette communication a trouvé un fort écho sur les réseaux sociaux et dans la presse, et la fréquentation de la plateforme a décuplé de manière phénoménale ces derniers jours. Ces actions sont essentielles pour nos adhérents, notamment pour ceux ne disposant pas de moyens pour communiquer.
Les instances de l'association vont très prochainement se réunir pour tirer un bilan de la situation et envisager de nouvelles solutions pour faire en sorte que les lecteurs soutiennent leur librairie de quartier plutôt que de commander leurs livres de Noël sur Amazon.