La gratuité des livres scolaires attire les jeunes en librairie
Connaissant une forte croissance de l’affluence de leur établissement lors de cette rentrée scolaire, Cécile Bory (Librairie Georges à Talence, également présidente de l’association des librairies indépendantes en Nouvelle-Aquitaine) et Pascal Dulondel (Librairie Cosmopolite à Angoulême) reviennent sur l’impact du dispositif de gratuité des livres scolaires porté par la Région Nouvelle-Aquitaine.
3 questions à...
Cécile Bory, gérante de la Librairie Georges à Talence (33), présidente de l’association des librairies indépendantes en Nouvelle-Aquitaine
& Pascal Dulondel, gérant de la Librairie Cosmopolite à Angoulême (16)
Comment s’est passée cette rentrée marquée par le dispositif de gratuité des livres scolaires ?
Cécile Bory : À la Librairie Georges, c’est Noël tous les jours en matière d’affluence ! La plupart des fédérations de parents d’élèves s’étant désengagées du dispositif, nous recevons de très nombreux parents qui viennent acheter les livres scolaires de leurs enfants et nous poser des questions. Nous avons dû nous adapter pour pouvoir recevoir cinq tonnes de livres par jour depuis trois semaines, ce qui entraîne nécessairement du retard dans toutes nos tâches.
Pascal Dulondel : Le travail préparatoire a été intense : nous avons libéré notre réserve de manière à recevoir un volume conséquent de livres. Dans la librairie aussi, nous avons agencé l’accueil avec une file d’attente et un comptoir dédiés. Finalement, il était surtout nécessaire de mener ce travail de pédagogie auprès de parents et d’établissements mal renseignés. Une fois que les gens ont compris le dispositif, tout va bien.
Quels axes d’amélioration identifiez-vous pour la mise en œuvre du dispositif ?
Cécile Bory : Étant encore dans le feu de l’action, il est difficile d’identifier posément les axes d’amélioration. Il nous faudra débriefer avec toutes les parties prenantes, notamment les fédérations de parents d’élèves, qui n'ont pas eu le courage ou la main d’œuvre suffisante pour se lancer dans l'aventure, mais aussi certains chefs d’établissement qui n’ont clairement pas joué le jeu en laissant les parents sur le bord de la route. Certains d’entre eux n’ont fourni aux élèves aucune explication sur l’utilisation de la plateforme voire même de liste de livres à acheter !
Pascal Dulondel : Dans plusieurs établissements scolaires, certains enseignants ont alimenté de fausses informations, renvoyant de nouveau vers nous des parents à qui nous avions expliqué le fonctionnement du dispositif… Sur le fond, je regrette que le chèque-lire de 20 euros – qui est un formidable outil amenant des jeunes gens aux livres – soit proposé en même temps que la gratuité des livres scolaires, le chèque étant alors utilisé en complément pour acheter des manuels. Il suffirait simplement de dissocier leur période de validité.
En quoi ce dispositif est-il nécessaire pour nos librairies ?
Cécile Bory : La gratuité des livres scolaires permet à nombre de personnes de découvrir des librairies qu’elles ne fréquentaient pas auparavant. Certains élèves ou parents d’élèves achètent d’ailleurs des livres autres que les manuels pour lesquels ils sont venus. Le flux n’est cependant pas aussi fort dans d’autres librairies.
Pascal Dulondel : Je ne remercierais jamais assez le président de Région et son équipe de permettre la gratuité des livres scolaires. C’est à la fois inespéré et encourageant pour la profession au regard des difficultés économiques qu’elle rencontre. Pour revenir d’un salon à Nancy, je peux vous affirmer que nos confrères de Grand Est, qui sont passés au tout numérique, auraient grandement apprécié cette réforme. Celle-ci est en effet un geste fort qui, au-delà de l’apport financier pour nos librairies, permet de retrouver les mercredis une affluence de jeunes personnes que nous n’avions plus connue depuis longtemps.
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